La charte des pirates : le premier manifeste égalitaire de l’Ancien Régime… ou presque…

Les pirates aux XVIIe et XVIIIe siècles semblent fonctionner suivant des règles qui paraissent improvisées et brutales mais qui sont tout leur contraire. Elles instaurent une discipline mais pas au sens où l’entend l’ordre social rigide et autoritaire de l’époque. Les principes que les pirates se sont constitués sont regroupés dans une Charte que le marin doit signer, une sorte de « contrat court » établi au début du voyage ou lors de l’élection d’un nouveau pirate. Cette charte traite à la fois de l’organisation à bord, des partages, de la discipline, comme de la sexualité, et de toutes les autres règles indispensables au fonctionnement de la vie à bord.

En ce qui concerne l’organisation à bord, le bâtiment obéit aux décisions du conseil commun (l’ensemble des pirates) qui élit le Capitaine. Celui-ci est désigné pour son courage et sa force lors des prises d’assaut, il n’a aucun pouvoir sauf lorsqu’il s’agit d’attaquer l’ennemi.

Le quartier-maître est un autre officier élu par les pirates, dont la fonction vient contrebalancer celle du capitaine. Il a la responsabilité de répartir équitablement les richesses ou les ressources sur le bateau (qu’il recense sur un carnet de comptes). Le quartier-maître est chargé également de désigner le plus justement le groupe d’abordage qui partira à l’assaut du bateau ennemi, il est une sorte d’intermédiaire entre le capitaine et les pirates. C'est l’équivalent d’un trésorier ou d’un premier ministre.

Il est évident que la fonction la plus élevée, la plus forte, est donc celle du groupe qui forme le conseil commun. Ils ont autorité sur le Capitaine qu’ils ont élu, ils peuvent le démettre dans certains cas, approuver ou réprouver ses choix ou certaines des initiatives qu’il propose, ils décident également des punitions ou du sort de prisonniers… Sur certains bateaux, le conseil commun se réunit souvent pour discuter du bien-être des pirates, ou pour revoir les décisions et les règles.

Sur le bateau, les fonctions sont sans cesse réévaluées, les liens entre les pirates s’opposent à toute hiérarchie dans les privilèges (par exemple, il n’y a pas de place, d’espace réservé ou attribué pour le capitaine), ce qui permet de préserver des relations sociales très saines. Les pirates ont aboli la relation salariale, le partage est le point de survie de leur aventure, ils dirigent le bateau comme leur propre propriété et déclarent qu’il est la propriété commune de ceux qui travaillent à son bord. Leurs pratiques s’appuient sur des valeurs collectivistes, antiautoritaires et… diablement égalitaires, un siècle avant la révolution française !!!

Image tirée de la série télévisée BLACK SAILS produite par Michael Bay