Noël ne fête pas la naissance de Jésus a l’origine…

Alors qu'à l'occasion de Noël, les chrétiens célèbrent la naissance du Christ, que sait-on réellement, d'un point de vue historique, de la venue au monde de Jésus ? Pas grand-chose, on ne connait même pas l’année exacte. Seule certitude, la date du 25 décembre a été choisie trois siècles après la date présumée par l’Eglise catholique, dans la seule optique de tenter de christianiser une fête romaine jugée encombrante, célébrant le solstice d'hiver et la renaissance annuelle du dieu solaire Mithra...

UNE ANNÉE DE NAISSANCE INCONNUE

Donc pour commencer, l'année de naissance de Jésus n’est absolument pas l’année que l’on utilise traditionnellement pour compter les dates. Les historiens s'accordent généralement pour situer la naissance de Jésus entre cinq et sept années avant notre ère. « Il n'est pas né en l’an I », souligne l'historien Jean-Christian Petitfils, cette date ayant été décidée à la suite d'une grossière erreur de calcul d'un moine du VIe siècle, Denys le Petit.

UN JOUR DE NAISSANCE DESTINÉ A FAIRE OUBLIER UN AUTRE DIEU

Ensuite, le choix du 25 décembre s'explique, lui, par la volonté de l'Eglise catholique de remplacer une fête romaine beaucoup trop populaire célébrant le solstice d'hiver (journée la plus courte de l’année) au 25 décembre. "Le 25 décembre est une fête romaine, celle du Soleil invaincu, et qu'on l'a interprétée ensuite comme étant la naissance de Jésus", confirme Thomas Romer, administrateur du collège de France et archéologue. Et d'ajouter : "Tout d'abord, l’église pensait que Jésus était né le 25 mars, car une tradition juive dit que les grands hommes naissent le même jour que celui où ils meurent". Or, poursuit-il, "selon l'évangile de Jean, Jésus est mort le 14 nissan, un jour avant la Pâques, ce qui correspond au 25 mars. »
Puis, lorsqu’il est devenu nécessaire aux yeux de l’église chrétienne de tenter d’effacer l’encombrant culte romain du Soleil Invaincu Mithra (l’empereur Aurélien envisageait en 274 d’en faire le Dieu officiel de l’Empire au grand dam des chrétiens), on s'est dit que le 25 mars n'était pas la date de la naissance de Jésus, mais celle de sa conception, ce qui permettait ainsi de le faire naitre bien commodément le 25 décembre, date que l’on croyait à l’époque être celle du solstice d’Hiver (en réalité cette date varie entre le 21 et le 23 décembre suivant les années).
La communauté chrétienne décida ainsi de contrer l’influence croissante de cette divinité païenne, le dieu solaire Mithra, en instaurant une toute nouvelle fête: celle de la naissance de Jésus. Exactement à cette date du 25 décembre. En 354, le pape Libère décida que le jour du solstice d'hiver serait en effet le plus approprié pour célébrer la naissance de Jésus, vu que les romains, mais aussi nombre de peuples depuis des millénaires, fêtaient à ce moment-là la renaissance du soleil. C’est ainsi que la date du 25 décembre devint officiellement la date de naissance de Jésus. Et que les chrétiens commencèrent à oublier progressivement à quoi elle correspondait en réalité, le lobby de ses dirigeants parvenant finalement à ses fins: le christianisme, appuyé par l’Empereur Constantin, gagna petit à petit du terrain sur le mithraïsme qui tomba bientôt dans l’oubli…

UN LIEU DE NAISSANCE QUI FAIT AUSSI DÉBAT

Pour Thomas Romer, il n'est "pas du tout clair" que le recensement de la population pour lequel Marie et Joseph se sont rendus à Bethléem ait vraiment eu lieu. "Seul l'évangile de Luc en parle." Et d'ailleurs, ajoute-t-il, "que Jésus soit né à Bethléem, on peut aussi en douter".
Quoi qu'il en soit, les conditions de la venue au monde de Jésus sont sans doute bien différentes de la description donnée par les évangiles, avec un Jésus emmailloté dans une mangeoire après l'arrêt contraint de Marie et Joseph dans une étable. "Je serais très réservé par rapport à la véracité de cette histoire", dit Thomas Romer, pour qui "on est beaucoup plus dans la symbolique que dans l'historique". La naissance de Jésus dans une étable "est une manière de montrer que ce futur Messie n'est pas comme on l'imagine (le rejeton d’une famille juive aisée), mais qu'il naît dans des conditions très précaires."

LES CRÈCHES, UNE MÉNAGERIE ÉTONNANTE

Quant au bœuf et à l’âne qui décorent régulièrement les crèches de Noël, vous aurez beau fouiller de fond en comble la Bible, vous n’en trouverez mention nulle part… Ces éléments ont été rajoutés tardivement (apparemment, par François d’Assise en 1223) sur la base d’un verset du prophète Esaïe: « Un bœuf reconnaît son propriétaire et un âne la mangeoire de son maître: par contre, mon peuple ne me reconnaît pas. »
D’ailleurs, le Concile de Trente, en 1563, interdit les représentations du bœuf et de l’âne! Face à un protestantisme grandissant, on est alors désireux de manifester plus de rigueur dans l’expression de la foi chrétienne… et on supprime donc certaines croyances fondées sur les seuls évangiles apocryphes. Cette recommandation fut relativement bien suivie jusqu’au milieu du XVIIe siècle. Impossible donc de voir des bœufs ou des ânes chez Velasquez, Vignon ou Rubens, par exemple! Puis les esprits s’assouplirent et le bœuf et l’âne réapparurent petit à petit…